Fréquence cardiaque chez le sportif amateur.  

Résumé :
    Premier bilan d'une étude menée sur quarante sportifs amateurs, licenciés ou non, dont la pratique sportive varie de 2 à 4 fois par semaines. L'objectif est de donner une interprétation, simple et utilisable par tous, des données fournies par les cardio-fréquencemètres. Ces derniers sont de plus en plus utilisés dans la pratique sportive mais laissent souvent l'utilisateur perplexe pour ce qui est du "bon usage".
    Jusqu'à présent l'utilisateur curieux rencontre deux approches. Une première statistique et théorique : la fréquence cardiaque maximale théorique (la FCM) est égale à 220-âge, ensuite pour obtenir la fréquence au seuil anaérobie on prend un pourcentage de cette fréquence. De même pour les fréquences d'entraînement qui sont elles aussi définies par des pourcentages de la FCM. La deuxième individualisé et nettement plus performante, consiste à faire un test d'effort et à mesurer en laboratoire les différents paramètres physiologiques. Le sportif amateur a alors des indications sur ses capacités physiques et sur les fréquences cardiaques qu'il peut soutenir sans danger.
    Nous proposons ici une approche qui n'est pas en concurrence avec les bilans personnalisés, mais plutôt un renouveau de l'approche statistique. L'idée principale étant d'utiliser une information qui est connu : le niveau de pratique.

Approche statistique classique
    En 1954 Astrand et Ryming ont établi la formule classique FCM=220-age à partir d'une étude statistique sur l'ensemble de la population. A partir de cette fréquence maximale théorique on peut déterminer différentes zones. Zone aérobie entre70% et 80%, zone du seuil anaérobie entre 80% et 90% de la FCM. On peut aussi utiliser la formule de Karvonen où FCE est la fréquence d'entraînement :
FCE = FCR + ( FCM - FCR ) x ( % de l'intensité )
Ce qui donne 50-60% : échauffement, récupération, perte de poids
60-70% : entraînement de base sur longue distance
~ 80% : endurance active ou résistance douce
85-90% : résistance dure fractionné long
90-95% : fractionné court
    Déjà en 1989 Vidalin notait que la FCM observée ne correspondait pas à la théorique pour la plus part des sportifs de plus de 30 ans. De même les sportifs n'arrivent pas toujours à trouver une utilité aux concepts de zone aérobie ou anaérobie définie par des pourcentages de la FCM.

Echantillon
    Nous avons suivi quarante sportifs amateurs hommes et femmes d'âge divers. Sportifs de récréation de niveau moyen qui pratique de 2 à 4 fois par semaine, groupe 3 dans la dénomination de D.Rivière, pour analyser certains résultats nous avons séparer en 3+ et 3-. La catégorie 3+ correspond à ceux qui pratiquent le plus régulièrement et surtout le plus intensément, ce sont des gens qui participent souvent à des petites compétitions. Nous rappelons que la catégorie 1 est celle des non sportifs, la 2 celle des sportifs occasionnels (environ une fois par semaine ), la 4 celle des passionnés qui font du sport tous les jours, la 5 celle des champions de haut niveau.
    L'étude a été conduite sur le terrain essentiellement lors de séances libres pour ceux qui ne font pas de compétition ou lors de séances d'entraînement pour ceux qui se préparent à la compétition.
    Les données recueillis ont été comparées à celles obtenus en compétition pour ceux qui en faisaient et aux données fournies par le laboratoire du Professeur Rivière à Purpan pour ceux qui avaient fait un test d'effort.
    Nous avons vérifier l'homogénéité de notre échantillon en comparant les résultats obtenus avec des athlètes de hauts niveaux ou avec des personnes qui ne pratiquent pas de sport. Le sport pratiqué par les personnes de l'échantillon est la course à pied (de loisir ou de petite compétition), certains font en plus un peu de vélo. Des mesures ont été effectuées sur des cyclistes à titre de comparaison.

Mesures
    La fiabilité des cardio-fréquencemètres semble bonne à partir du moment ou ils sont posés correctement. La fiabilité des indications fournies par les sportifs sur les valeurs observés nous a paru correcte. Le fait de pouvoir faire chez le même individu plusieurs mesures similaires pour s'assurer de la cohérence des résultats est un facteur important dans la fiabilité de la valeur prise.
FCM :
    Nous avons pris la valeur la plus élevé que la personne a pu rencontrer. Comme la vitesse maximum pour les voitures il faut le faire exprès ! Soit on la mesure en compétition ce qui n'est pas toujours facile soit sur un test (suffisamment long et intense) qui devient en fait une simili compétition avec soi même, la validité du résultat étant alors liée à la motivation. Beaucoup de sportifs de l'échantillon, qui n'utilisaient pas le cardio, en compétition de courte durée, avait au départ une idée fausse de leur FCM. Les mesures les plus élevées ont été obtenues dans une situation dans des tests progressifs mais qui se terminaient par des efforts type sprint. Exemple : 1/4h d'échauffement ensuite 1000m pour amener la fréquence aux environ de 170 et pour finir un 400m fait rapidement avec une arrivée le plus vite possible. (La fréquence de VMA ne nous est pas apparue comme étant la plus élevé. Un sprint final semble utile pour l'atteindre.)
FCrepos :
    Nous avons pris la valeur la plus basse que la personne a pu rencontrer. Ici aussi quelques surprises devant les variations assis/couché, matin/ soir, stressé/décontracté etc.. Cette valeur comme la précédente ne doit pas à notre avis prise comme une vérité absolue car il y a une variation non négligeable liée aux conditions de la mesure. Les expériences faites avec holters confirment qu'il y a une différence entre valeur minimale et valeur de repos observé par exemple par une mesure le matin après le lever.
FCseuil :
    Si l'évaluation de la FCM ou de FCrepos ne pose pas trop de problème sur le terrain, le principal obstacle, hors laboratoire, est l'évaluation de la zone de transition aérobie anaérobie. Comme définition du seuil anaérobie nous avons pris le moment où la production d'acide lactique va commencer à devenir gênante pour la poursuite de l'exercice, (environ 4mmoles de lactates/l.) ce qui se traduit sur le terrain par le niveau maximum d'effort que l'on peut faire durer environ une heure. Cette traduction n'a de sens que pour des sportifs assez entraînés qui peuvent supporter un effort intense et long, elle correspond pour eux au niveau d'effort où il est indispensable à l'entraînement de faire des efforts par intervalles et non en continu Dans notre échantillon de sportifs la corrélation entre les valeurs du terrain et celles du laboratoire nous a semblé bonne. Le paradoxe de l'étude est la stabilité et la faible dispersion autour de la moyenne de cette valeur qui, parait pourtant au départ difficile à mesurer et de plus très lié à l'individu.

Données
Num Age Sexe Niveau FCRepos FCSeuil FCMax
140M 3 -50168180
240M 3 +45170187
340M3 - 48170182
436M3 +50 173195
551M3 +45 168180
650M 3 -50165175
729M 3 -52170190
830M 3 -45175188
931F 3 -55175203
1050M 3 -55165175
1135M 3 -50174190
1249M3 +45 168190
1347M3 +45 170185
1422F3 -60 175200
1561M3 -45 168180
1651M3 +48 168183
1732M3 +50 175195
1841F3 -45 174188
1932M3 -44 171190
2024M3 -50 175195
2136M3 -45 170190
2255M3 +48 170185
2322M3 -55 174192
2442M3 -55 172190
2534M3 -45 168180
2631M3 -45 175184
2731M3 -45 176188
2835M3 -45 168184
2928M3 -45 173189
3032M3 -48 174190
3152F3 +55 165178
3218F3 -58 175204
3355M3 +45 172189
3423M3 +50 177201
3535M3 -45 168185
3649M3 +42 169189
3752M3 +50 170185
3835M3 +48 175195
3938F3 +55 172190
4040M3 -47 171192


Tableaux des moyennes
    Ces moyennes et écart-types ne tiennent pas compte des effets de l'âge, ni des effets croisés entre le sexe et le niveau et donc doivent être considérés avec prudence.
Sexe   FCRepos FCSeuil FCMax
F    Moyenne 54,6667    172,6667    193,8333   
    N    666
    Ecart-type 5,1640    3,9328    10,2453   
M    Moyenne 47,6471    171,0294    187,2059   
    N    343434
    Ecart-type 3,3474    3,1765    5,8609   
Total    Moyenne 48,7000    171,2750    188,2000   
    N    404040
    Ecart-type 4,3981    3,2971    6,9474   

Sexe   FCRepos FCSeuil FCMax
3 +    Moyenne 48,5000    171,0625    189,1875   
    N    161616
    Ecart-type 4,0000    3,2755    7,0637   
3  -    Moyenne 48,8333    171,4167    187,5417   
    N    242424
    Ecart-type 4,7243    3,3740    6,9406   
Total    Moyenne 48,7000    171,2750    188,2000   
    N    404040
    Ecart-type 4,3981    3,2971    6,9474   

Diagrammes de dispersion
    Pour les diagrammes donnant les résultats d'ensembles on a tracé l'intervalle de confiance correspondant à 90%. Pour tous les diagrammes on a tracé la droite de régression.
Fréquences au repos ensemble de l'échantillon

Fréquences au repos droites de régression séparées

Fréquences au seuil ensemble de l'échantillon

Fréquences au seuil droites de régression séparées

Fréquences maximum ensemble de l'échantillon

Fréquences maximum droites de régression séparées

Analyse
Dispersion des résultats.
  ¤  FCrepos : La moyenne est de 50, ce qui est bas, par rapport à la population normale. L'intervalle associé à 90% est de +ou- 11 points, ce qui est assez important. Il est à noter que beaucoup de sportif constatent des variations non négligeables de cette fréquence suivant les périodes de forme ou de fatigue.
  ¤  FCseuil : Un écart de plus de 10 points de la FCseuil par rapport à la valeur moyenne pour le niveau et l'âge considéré est possible mais rare, l'intervalle de confiance à 90% correspond à +ou- 6 points.
  ¤  FCmax : La dispersion est un peu plus importante, l'intervalle de confiance à 90% correspond à +ou- 11 points. Elle se réduit si on considère le groupe des sportifs classés 3+ qui ont des pratiques intenses avec des fréquences élevées.
    Le niveau de pratique semble très déterminant dans les fréquences cardiaques d'effort, la considération d'un échantillon homogène réduisant la dispersion. Il n'y a pas pour autant une valeur exacte mais une répartition qui semble suivre une loi normale comme pour beaucoup de paramètre physiologique.
Effets de l'âge.
  ¤  FCrepos : Baisse de 0.1 point par an ce qui n'est pas significatif. Les fréquences observées sont bien plus basses que la moyenne générale de la population
  ¤  FCseuil : La baisse est de l'ordre de 0.2 par an pour l'ensemble, un peu moins pour les 3+. Cette baisse faible associée à la faible dispersion constatée, est un résultat surprenant qui mérite une étude plus approfondie.
  ¤  FCmax : La baisse est de l'ordre de 0.4 par an en moyenne, mais ici la différence entre nos deux sous-groupes est nettement plus significative : 0.6 pour les 3-, 0.2 pour les 3+
  ¤  Interprétation : L'âge est une variable qui a un effet sociologique important, la pratique sportive diminuant avec l'âge. La baisse de la FCM mesurer chez les non sportifs est bien plus importante ce qui explique que sur échantillon pris de manière aléatoire dans l'ensemble de la population la baisse de la FCM soit d'environ un point par an.
Pour ce niveau de pratique les formules adaptées seraient plutôt :
FCM=210-âge/2            Fcseuil=180- âge/4
Ces formules ne sont pas une norme mais peuvent servir de référence pour un sportif moyen. Il faut très légèrement augmenter les valeurs obtenues pour un sportif de niveau élevé, par contre il faut les baisser pour ceux qui pratique un peu moins ou qui ont des pratiques essentiellement tournées vers l'endurance. Rare sont les personnes qui en prenant de l'âge peuvent continuer à pratiquer intensément et régulièrement une activité physique. Il ne faut pourtant pas s'étonner si on trouve des sportifs de 60 ans avec des FCmax de 185 au lieu des 160 attendues, ce n'est pas forcément un signe de tachycardie.
    Pour la FCseuil la différence d'évolution avec l'âge est beaucoup moins significative, elle est à peine plus légère dans la catégorie 3+.
    Pour la FCrepos la baisse très légère traduit peut-être une évolution avec l'âge vers des pratiques d'endurance.

Récupération inertie cardiaque.
    Outre les données présentées nous avons constaté que le cœur réagit assez rapidement au situation d'effort, mais sur ce point l'âge a un effet important. Par exemple sur un 1000m en entraînement fractionné avec un objectif similaire on aura le tableau suivant :
  Départ 200m 400m 600m 800m 1000m +30s +60s +90s +120s
20/30 ans   100 150 170 175 175 175 130 120 110 100
40/50 ans   100 135 155 165 170 170 140 125 110 100
    De même le ralentissement de la fréquence se fait aussi plus lentement avec l'âge. La rapidité de récupération est un élément important dans l'appréciation de la qualité de l'effort. L'apparition d'un temps plus important pour la récupération est un bon indicateur de fatigue (cf thèse du Dr Turblin) qui précède en général la sensation de fatigue et qui se traduit par une augmentation de la fréquence pour tenir le même niveau de performance.
    Quoiqu'il en soit, il est illusoire de croire que la fréquence cardiaque, même pour un même individu est une fonction stricte de l'effort fourni (cf. effort long).

Articulation PMA /FCM Puissance au seuil/fréquence au seuil.
    Si l'on a pu constater une stabilité importante dans les fréquences tous les sportifs n'ont pas les mêmes performances. La PMA, qui correspond sur le terrain à la puissance maximale que l'on peut développer pendant 6 à 7 minutes, est étroitement lié à la VO2 max et la puissance au seuil à la VO2 du seuil. Le rapport entre les deux données se situe pour la plus part des sportifs de notre échantillon entre 80% et 85%.
    Chez le sportif l'augmentation de ce rapport est certainement liée au type de pratique. Les spécialistes du demi-fond court qui travaillent beaucoup leur VMA (traduction pour le coureur de la PMA) n'ont pas un rapport aussi élevé que les marathoniens qui font beaucoup de travail au seuil. L'augmentation de ce rapport est très rapide dans le début de la pratique sportive mais ensuite il se stabilise en fonction de la répartition des divers types d'efforts. En effet chez les sportifs qui ont des moments d'activités intenses à fréquences élevées la FCM est très élevée par contre ceux qui ont une pratique tout aussi importante en durée mais moins intense la FCM baisse avec l'âge alors que la FCseuil reste stable

Effort de longue durée
    Au-delà d'une heure il n'est pas possible de mobiliser un pourcentage aussi élever de sa PMA la baisse étant à peu près une fonction linéaire du logarithme du temps. Cette approche conduit au concept d'index d'endurance qui utilisé avec comme point de départ la VO2 max et non la VO2 seuil ne donne pas une modélisation efficace pour la prédiction du comportement dans les efforts de longues durées.
    Pour la fréquence cardiaque il est difficile de trouver une règle simple car avec la fatigue pour une même puissance on a une augmentation de la fréquence, ce que l'on appelle "la dérive cardiaque". On a donc dans cette situation une fréquence au seuil avec une puissance inférieure à la puissance au seuil. Par exemple pour un temps de trois heures au marathon pour un sujet âgé de 40 ans on a obtenu le tableau :
    durée 1 h 2 h 3 h Finish
    moyenne des FC 163 169 175 185
    Le coureur est parti à une vitesse de 14km/h qu'il a gardé constante sauf à la fin du parcours (temps 3heures…). Au départ en dessous du seuil il avait une fréquence de 160 environ. Sa vitesse au seuil (FCseuil : 172) correspondait en fait à 15,2 vitesse qu'il était hors de question pour lui de maintenir 3 heures. Partir avec une fréquence cardiaque de172 aurait amener ce coureur à des difficultés insurmontables. La seule solution aurait consisté à baisser de manière continue sa vitesse, ce qui n'est pas expérimentalement la meilleure stratégie, une vitesse à peu près constante optimisant la performance. Ce tableau correspond à un cas particulier, pour la vitesse cela dépend du niveau de chacun, mais pour les fréquences, il est apparu assez standard avec + ou - 5 points d'écarts, lorsque les coureurs ont eu l'impression de réussir leur course.
    Dans les efforts longs la difficulté signalée dans la définition du seuil anaérobie apparaît clairement. Le seuil anaérobie est une zone d'équilibre entre plusieurs facteurs biologiques notamment la production d'acide lactique et l'élimination de ce dernier (la clairance lactique), cet équilibre complexe n'est pas stable. Après un effort de plus d'une heure le niveau de performance dans la zone du seuil a tendance à baisser. Si on se place trop tôt dans la zone du seuil, pour conserver le même niveau de performance, il ne reste plus qu'a dépasser l'équilibre. Cela se traduit par les classiques crampes ou "coups de pompes" après 2h ou 2h1/2 d'efforts.
    Il faut signaler que les problèmes hydriques et énergétiques jouent un rôle extrêmement important dans les efforts de longues durées et sont souvent causes de défaillances. La déshydratation modifie le comportement cardiaque. Une baisse importante de la FC lors d'une épreuve se traduit par une baisse de la vitesse mais peut aussi être considérer comme un voyant d'alerte.

Courbe individuelle.
    La variation de la vitesse ou de la puissance développée est une fonction linéaire de la fréquence cardiaque entre environ 110 pulsations et la FCseuil. Ensuite la courbe à tendance à s'infléchir, très peu chez les meilleurs sportifs nettement plus chez les 3-. Cette inflexion qui peut permettre de déterminer la FCseuil est parfois difficile à repérer et rend l'usage du test de Conconi périlleuse. Néanmoins, les sportifs de la catégorie 3 on tout intérêt à dresser un tableau vitesse fréquence qui permet d'avoir une bonne idée de son niveau d'entraînement et de sa progression dans le temps.
    Tableau du coureur qui a servi d'exemple pour le marathon. (avec un léger arrondi sur les valeurs…)
    fc 120 130 140 150 160 170 FCseuil 175 180 FCmax
    Vitesse km/h 10 11 12 13 14 15 15,2 15,7 17,1 18,5
FCseuil = 172         FCmax = 185
    Coureur de la catégorie 3+, âgé de 43 ans, avec une FCrepos de 45 et une pratique sportive plutôt tourné vers les efforts longs. Le rapport PMA/Puissance seuil est de 82%.
    Sur ce tableau on voit clairement que 172 correspond à un point d'inflexion.
    Les mesures doivent être effectuées après un bon échauffement mais avant une trop grande fatigue (cf. la dérive cardiaque) au-delà du seuil les mesures sont plus complexes car il est difficile de maintenir ces efforts au-delà de quelques minutes (7mn pour la FCmax) et il faut courir environ 800 mètres à vitesses constantes pour stabiliser la fréquence.
    Le delta de vitesse pour 10 points d'augmentation de fréquence est un excellent indicateur de niveau de forme qui de plus peut-être contrôler à des fréquences peu élevées (140/150).

Variations en fonction du sexe
   Il semble voir apparaître une fréquence plus élevée chez les filles en fréquence de repos et en fréquence maximale, par contre le différentiel pour la fréquence au seuil semble bien plus faible. L'échantillon, trop réduit, n'autorise pas de conclusion, mais semble confirmer d'autres résultats

Comparaison entre 3+ et 3-
    La différence est non significative pour la fréquence au repos, de l'ordre de 1 à 2 au-dessus de la fréquence seuil pour les 3+, mais par contre elle est au-dessus d'environ 8 battements pour la fréquence maximum, ce qui est très important et traduit bien les différences de pratiques.

Comparaison avec les sportifs du groupe 4 et 5
    Nous avons constaté peu de différence sur les FCrepos et FCseuil entre les sportifs de notre catégorie et les sportifs de niveau plus élevé L'écart se situant sur le comportement au-delà de la fréquence au seuil. La différence est celle signalée dans le tes de Conconi : le point d'inflexion qui correspond à la FCseuil est à peine voire pas du tout perceptible. La FCmax est toujours élevé.

Comparaison avec les groupes 1 et 2
    Chez les non sportifs la comparaison est plus difficile. L'impression sur quelques cas est que le problème n'est pas du côté des fréquences qui resteraient, par réflexes assez élevés mais sur la situation difficile induite par des fréquences élevées. Le "reste" ne suit pas on comprend vite avec quelques mesures le risque pris par le Tarzan du dimanche qui atteint trop facilement des fréquences élevées pour ses capacités cardio-vasculaires. Lors de sympathiques ballades en montagnes on peut voir des personnes non entraînées avec des fréquences cardiaques de l'ordre de 180, on comprend qu'il faille ensuite plusieurs jours de récupérations. Dans ce cadre là le sport peut-être parfaitement nuisible. L'utilité du cardio-fréquencemètre est ici réelle car il permet à celui qui veut reprendre une activité de faire un effort progressif et de commencer à 50% de sa capacité soit environ 125/mn ce qui correspond environ à [FCrepos +(FCM-FCrepos)/2]. Il est à noter que la pratique sportive augmente la FCM (utilisable sans risque) et baisse la FCrepos cela laisse donc le milieu à peu près invariant, cette fréquence restant même chez le sportif entraîné une référence pour les efforts de longues durées. Il va sans dire que les performances progressent vite à la fois pour une fréquence donnée mais aussi par la capacité de faire de l'exercice sans risque à une fréquence plus élevée.
    Parler de FCM et de Fréquence au seuil n'a donc du sens qu'à partir du moment où il n'y a pas de risque. Faire des statistiques sur des valeurs qu'il ne faut pas atteindre n'a pas grand intérêt. Cela me semble être l'origine de l'erreur véhiculer par la fameuse formule. Faire la moyenne entre un sportif de haut niveau, un petit amateur et un sédentaire réfractaire à toute activité physique n'a aucune signification.

Remarque sur les cyclistes
    Le cyclisme est un sport qui mobilise un petit peu moins de muscle que la course à pied car il est porté, cela explique peut-être des fréquences légèrement inférieure. Cette relative facilité autorise en contre partie des durées nettement plus importantes. Un cycliste amateur peut très facilement faire deux sorties de trois à quatre heures par semaine, cela lui donne un entraînement d'endurance remarquable. Pour les cyclistes qui pratiquent la randonnée, les mesures semblent équivalentes à celles des coureurs à pied qui ont essentiellement des pratiques tournées vers l'endurance. Nous n'avons pas encore eu d'exemples de cyclistes ayant une pratique intense mais la littérature semble indiqué que l'on retrouve des résultats similaires aux coureurs à pied.

Tableau récapitulatif
    Ce tableau peut servir de référence à partir du moment où la personne pratique au moins deux fois par semaine une activité physique :
    Age 20 30 40 50 60
    FCM 205/195 200/190 195/185 190/180 185/175
    FCSeuil 180/170 180/170 175/165 175/165 170/160
    En première approximation la fréquence essentielle pour cette catégorie de sportifs amateurs est 170 pour la FCseuil un peu plus pour les jeunes un peu moins au-delà de la 40/50 ans. Cette fréquence qui peut paraître élevée est raisonnables dés que l'on se situe dans un niveau de pratique régulière. Elle doit cependant être réservée à la compétition ou à des séances d'entraînement où l'effort est fractionné.

Bilan pratique
    Un sportif amateur doit ventiler sa pratique sur :
                une allure foncière 125/140 de 50% à 70% du temps
                une allure soutenue 150/160. de 20% à 30% du temps
                un travail au seuil 165/175 de 10% à 20% du temps
    L'effort correspondant au seuil ne doit plus être pratiqué en continu, mais sur du fractionné long (au delà de 800m).Un dépassement occasionnel de ces valeurs autour de 180 ne semble pas poser problème mais cela correspond plus à une volonté de participer à des compétitions et nécessite un suivi particulier. Cela correspond à une pratique de fractionné court qui permet d'augmenter efficacement la VMA. Dans cet esprit là il faut en plus augmenter le pourcentage de travail à fréquence élevé. La répartition 50/30/20 correspond à un niveau adapté à la compétition. La répartition 70/20/10 correspond à une pratique plus modérée mais largement suffisante pour se maintenir en excellente condition physique. Il est à noter que les risques ostéo-articulaires augmentent sérieusement aux fréquences élevées. L'enquête de terrain à montrer que pour la course à pied dans la génération des 40/60 ans la limitation n'est pas cardio-vasculaires ou respiratoire mais se trouve du côté des tendinites et des cartilages du genou. Pour le vélo la limitation est dans le risque lié aux chutes, car le risque ostéo-articulaire est très faible.

Physiologie cardiaque.
    Le cœur est un muscle strié commandé par le système nerveux autonome. Les fibres sont infatigables au rythme de repos et ce pendant des années. Il assure le débit sanguin, c'est à dire le transport de l'oxygène et des nutriments vers les tissus périphériques et donc les muscles en activité. Ce débit est relativement stable au repos mais peut augmenter de façon impressionnante à l'effort, c'est une fonction du volume intra cardiaque, de la force de contraction du cœur et de la fréquence des contractions :     D = VES X FC
        D
est le débit
        VES volume d'éjection systolique tient compte du volume intra cardiaque et de la force de contraction du cœur
        FC est la fréquence des battements cardiaques.
    Il faut tenir compte des résistances périphériques, obstacle au débit sanguin et qui sont représentées par l'élasticité des vaisseaux artériels et artériolaires qui s'oppose à l'écoulement du sang vers les tissus. De plus il existe des artérioles et des capillaires non ouverts au repos, mais qui vont s'ouvrir à l'effort, facilitant le passage de l'oxygène. Il faut noter que chez le sportif entraîné le nombre de ces capillaires fonctionnels est beaucoup plus important, ce qui provoque une diminution des résistances périphériques à l'effort mais aussi au repos. Cela se traduit par une tension artérielle plus basse au repos que le sédentaire, et une chute tensionnelle rapide à l'arrêt de l'effort par piégeage d'une quantité très importante de sang dans les jambes très vasodilatées.
    Le VES est très élevé chez le sportif entraîné en endurance et en résistance car l'endurance développe le volume intracardiaque et la résistance la force de contraction. Donc au repos pour un même débit la fréquence sera nécessairement plus faible chez le sportif.
    A l'effort, passé un certain stade le VES n'augmente plus et c'est seulement la fréquence qui permet d'augmenter encore le débit. A partir d'une fréquence élevée le temps entre deux contractions (diastole ) n'est plus suffisant pour que le cœur puisse se remplir convenablement, et une augmentation de fréquence ne se traduit plus par une augmentation de débit proportionnelle à l'augmentation de fréquence. De plus comme les coronaires irriguent le cœur en diastole, au-delà d'une certaine fréquence, l'apport d'oxygène à notre pompe n'est plus suffisant pour le travail effectué et il souffre. D'après notre étude ce seuil semble correspondre au seuil anaérobie soit environ 170/175.
    L'étude de la FC est un moyen simple de quantifier l'augmentation du débit cardiaque à l'effort.
    Par exemple pour un sportif si nous partons d'une FC de repos de 50 pulsations / mn environ, si nous soumettons l'organisme à un effort d'abord minime, comme une tâche quotidienne nous retrouvons rapidement à 70-80 p/mn Pour une marche rapide ou un footing lent nous sommes à 100 ou 120. Pour un footing fait en discutant, sans effort, la FC oscille entre 120 et 140.
    Si on passe ensuite à un effort plus intense la FC évolue entre 140 et 170, si l'organisme n'est pas encore entièrement mobilisé par l'effort celui-ci demande une certaine concentration et le sportif abandonne toute conversation suivie…. Il est encore à une vitesse de " non-accumulation lactique " c'est à dire où les mécanismes internes de l'organisme pour l'élimination des déchets ne sont pas saturés, cela correspond à un débit pouvant être considéré comme optimal car il permet un effort de longue durée. Au-delà nous dépassons le stade du confort et des facteurs limitants vont apparaître très vite. Jusqu'à la FC seuil le principal facteur limitant est le manque de réserves en glycogène car la source d'énergie prédominante est la glycolyse anaérobie. Il est légèrement variable selon les individus et semble dépendre de facteurs multiples comme l'âge, l'hérédité ou l'entraînement. L'idée d'une zone de seuil où le sportif peut maintenir un état d'équilibre plus ou moins longtemps semble plus proche de la réalité que celui d'une barrière précise.
    Au-delà nous dépassons le stade du confort et des facteurs limitants vont apparaître très vite.
    Jusqu'à la FC seuil le facteur limitant est le manque de réserves en glycogène, mais les réserves de l'organisme permettent un effort pouvant atteindre une heure.
    Après la FC seuil, l'intensité de l'effort peut-être poursuivie la FC peut augmenter encore d'une trentaine de pulsations chez les sportifs entraînées, mais le débit sanguin n'augmente plus tout fait de manière proportionnelle à la fréquence. Le seuil se traduit sur la courbe vitesse/fréquence par un point d'inflexion mais plus le sportif est entraîné plus la perte de rendement semble faible ce qui donne des points d'inflexions très peu marqués. La production importante d'acide lactique liée à la glycolyse anaérobie ne peut plus être suffisamment éliminée et son accumulation devient le principal facteur limitant de l'exercice. Dans un effort très intense proche des fréquences maximales cette saturation peut intervenir en quelques minutes.
    Chez le sédentaire les phénomènes sont similaires. La fréquence de repos est de l'ordre de 70, une activité quotidienne donne des fréquences de l'ordre de 80 à 90 et le moindre effort fait allègrement dépasser une fréquence de 100. Une marche rapide met le sédentaire en situation d'effort intense avec une fréquence de 130/140, courir conduit très vite niveau du seuil anaérobie et à son dépassement.

Conclusion
    Si l'enquête donne l'impression que le comportement en fréquences du cœur est assez similaire chez tous les individus, la diversité est pourtant bien présente. Un sportif entraîné peut jouer de toute la gamme de fréquence (de 45 à 195 environ) alors que le sédentaire se contentera d'une échelle plus réduite de (70 à 170 environ). La pratique sportive régulière permet de conserver année après année une gamme de fréquence très étendue. La fréquence cardiaque ne donne que des informations partielles, à fréquences identiques le niveau des performances peut-être très différent. Elle peut cependant permettre de guider une pratique sportive de niveau faible ou moyen. Dans le premier cas elle peut aider à éviter les efforts nuisibles au système cardio-vasculaires et dans le second favoriser une pratique optimale entre plaisir et performance. Pour les sportifs de niveau élevé l'usage du cardio-fréquencemètre est déjà rentrer dans l'usage pour optimiser les performances. Il faut souhaiter que les médecins et entraîneurs chargés de donner du sens à tous ces chiffres produits par les cardio-fréquencemètres le fassent sans oublier que derrière les chiffres il y a des hommes et des femmes.


François Saint Pierre                 Jean Paul Brackman

    Pour écrire : François Saint Pierre